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Transition énergétique : quelles alternatives ?

14 Décembre 2012
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Le comité sur la transition énergétique a commencé à débattre sur l’orientation à donner à la politique énergétique. Ce devrait être un débat uniquement technique et économique, mais ce sujet a depuis longtemps quitté le terrain de l’objectivité : des positions passionnelles viennent obscurcir le sujet, et bien des responsables politiques sans compétences techniques sont prêts à se faire hacher menu pour des thèses irrationnelles.

Un impact considérable

Transition énergétique : quelles alternatives ?
Cependant les conséquences des choix actuels sur la politique énergétique peuvent avoir un impact considérable sur le niveau de vie futur de la Société. Le point le plus sensible est la question nucléaire. Il est légitime de se méfier d’une technique qui tue insidieusement : la radioactivité modifie l’ADN des cellules, générant des cancers. On comprend que l’on veuille éviter de l’utiliser. Mais si le prix à payer est de devoir se passer à terme de l’énergie, après l’épuisement des énergies fossiles, il faut peut-être y réfléchir à deux fois. Car retourner à l’époque moyenâgeuse, avec une population qui a décuplé depuis, personne n’y songe vraiment.

La question au cœur de la transition énergétique est de savoir si les énergies renouvelables (photovoltaïque et éolien) peuvent remplacer le nucléaire, y compris après l’épuisement des énergies fossiles. Prenons l’exemple significatif de l’Allemagne, qui a opté pour l’abandon du nucléaire au profit des ENR. Avec tout le sérieux et les moyens de nos voisins d’outre-Rhin, des investissements massifs ont déjà été consentis en ENR, avec de maigres résultats: en 2010, l’éolien n’a produit que 5,9% du total de l’électricité, et le photovoltaïque 1,9 %. Les investissements se poursuivent, grâce à des subventions aux ENR qui leur permettent d’avoir un prix équivalent aux autres moyens existants (énergies fossiles et nucléaire). Ces subventions vont représenter 20 milliards d’euros en 2013 (3 milliards en France).

Des investissements colossaux

Elles sont financées par une taxe (appelée CSPE en France) qui se rajoute sur la facture d’électricité, payée en Allemagne par les seuls clients domestiques, pour ne pas pénaliser l’industrie. L’électricité domestique y est déjà deux fois plus chère qu’en France. Cependant, on en est qu’au tout début de la transition énergétique. Des investissements colossaux restent à faire pour que l’Allemagne parvienne à seulement 30% d’ENR : éoliennes marines principalement (les éoliennes terrestres produisent moins, et sont mal acceptées par la population, comme en France), et renforcements coûteux du réseau électrique pour amener l’électricité éolienne de la Baltique à la Bavière.

Quant à l’objectif à long terme de 100% d’ENR, après épuisement des énergies fossiles, c’est une escroquerie intellectuelle : le facteur de charge de l’éolien (pourcentage d’heures équivalentes pleine charge) en Allemagne étant de 20%, celui du photovoltaïque de 9%, on ne pourra jamais dépasser les 30% pour ces deux énergies cumulées (aussi sûrement que les ENR ne peuvent produire par les nuits sans vent).

Le problème de l’intermittence

Car le grand ennemi des ENR, c’est l’intermittence. Prenons l’exemple concret du futur parc français d’éoliennes marines, dont la première tranche a été décidée, et qui aura en finale une puissance installée de 6 GW (équivalent de 6 centrales nucléaires actuelles). Quand le vent s’arrête ou faiblit (une diminution de moitié de la vitesse du vent divise par 8 la puissance fournie), il faut pouvoir remplacer, intégralement en cas de vent faible ou nul, les 6 GW par une autre énergie. Deux cas se présentent alors :

1. L’énergie éolienne remplace de l’énergie nucléaire existante, pour faire baisser le taux de nucléaire. Cette énergie éolienne sera vendue à EDF environ 220 €/MWh, en permettant à EDF une économie de combustible nucléaire de 30 €/MWh, soit un surcoût de l’éolien de 86%. Cumulé pour les 6GW pendant les 20 ans du contrat de fourniture, le surcoût sera de 60 milliards d’euros. De facto, aucune des centrales nucléaires existantes ne pourra être arrêtée, car il faut pouvoir disposer de toute leur puissance en cas de vent nul. 60 milliards d’euros de surcoût sans produire 1 kWh de plus, sans fermetures possibles de centrales nucléaires et avec des éoliennes en fin de vie au bout des 20 ans, c’’est un gaspillage pur. Ce raisonnement vaut pour l’arrêt prévu de Fessenheim, qui devra obligatoirement être remplacé par une nouvelle centrale à combustible fossile (du gaz, très probablement), ou alors l’économie française devra réduire sa consommation d’énergie d’une même quantité d’énergie que la production de Fessenheim. Pour pouvoir arrêter ses centrales nucléaires sans baisse de la consommation d’électricité, l’Allemagne montre que ses investissements en ENR ne suffisent pas, puisque qu’elle a actuellement en construction 26 centrales au lignite, un charbon de mauvaise qualité, qui pollue gravement (émission de métaux lourds, cancérigènes), et dont les exploitations en surface dégradent fortement l’environnement.

2. L’énergie éolienne a été rajoutée pour augmenter la puissance du réseau de 6 GW. Quand le vent tombera, la continuité de la fourniture ne pourra se faire que par de l’énergie thermique à combustible fossile (le nucléaire étant banni). Il faudra donc construire des centrales thermiques pour 6 GW, qui fonctionneront pendant 70% du temps. C’est un doublon d’investissement.

Et le nucléaire ?

Dans le cadre de la transition énergétique, il est prévu par le gouvernement français d’arrêter le tiers des centrales nucléaires, soit 25 GW, en les remplaçant par des ENR (éolien, surtout). Il faudra alors, comme en Allemagne, installer aussi pour 25 GW de centrales thermiques, qui fonctionneront 2,3 fois plus que les éoliennes. Et on arrive à cet incroyable paradoxe : la transition énergétique conduira à gaspiller en 20 ans au total plus de 150 milliards d’euros (adaptations du réseau compris), pour produire la même quantité d’énergie qu’auparavant, et émettre bien plus de CO2, en payant de surcroit la taxe carbone correspondante. La France est actuellement la plus vertueuse des grandes nations pour la pollution au CO2, et celle dont l’électricité est la moins chère, mais elle rentrera dans le rang. Quelle satisfaction pour ceux qui n’aiment pas notre pays!

Alors, il faut peut-être se poser à nouveau la question du nucléaire. L’émotion soulevée par Fukushima est compréhensible. Il faut reconnaitre, cependant, que ce fut un évènement exceptionnel : ce n’est pas le tremblement de terre qui a endommagé la centrale, mais le tsunami, qui a noyé les groupes électrogènes de secours de la centrale. Tirant les enseignements de cette catastrophe, l’Autorité de Sûreté Nucléaire française a défini des dispositifs de sécurité complémentaires, en cours d’installation, et notamment un bunker par site renfermant les groupes électrogènes et des équipements de sécurité, tels que les pompes de refroidissement.

Ne pas arrêter à nouveau la chaîne

La probabilité d’accident nucléaire est devenue très faible. Rappelons qu’à Fukushima, il n’y a pas eu de mort, et une irradiation réduite du personnel : pour un taux maximum admissible de 250 mSv par personne, 3 opérateurs ont eu des doses de 170 mSv et 18 de plus de 100 mSv. C’est peu en comparaison des 30 000 morts dus au tsunami, et aux 3 à 5000 morts annuels des mines de charbon chinoises.

Les dépassements très importants de coûts et délais des chantiers des EPR de Finlande et Flamanville s’expliquent principalement par leur position de têtes de série, et la perte du savoir-faire français après 20 ans sans construction de centrales nucléaires. Mais ce nouvel apprentissage a bénéficié aux deux EPR chinois, dont les chantiers sont parfaitement en ligne avec les budgets et plannings. Cependant, il ne faudrait pas arrêter à nouveau la chaîne.



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