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La nouvelle maladie économique : le catastrophisme

15 Décembre 2011
Louis Peretz
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L'alternative, c'est la sortie de l'euro ? À cette question légitime, Jean- Paul Fitoussi directeur de recherche à l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), a répondu, dans une interview accordée à Libération, : "Non. Ce serait un cataclysme économique. La monnaie serait dévaluée, les dettes publiques s'envoleraient. Le protectionnisme rayonnerait. Et la récession ferait exploser le chômage. Un cycle dévastateur et durable." Il me semble que cette conclusion est hâtive et cela m’étonne de la part d’un économiste qualifié comme celui-ci. Et cela pour trois raisons :

1 - La dévaluation peut être contrôlée

La nouvelle maladie économique : le catastrophisme
La dévaluation peut être contrôlée en dirigeant le cours du franc réanimé. Nous supposons que la parité Euro-Franc serait la règle au moment décidé par sa réintroduction sur le marché intérieur. Les accords bilatéraux existent entre la Chine et les U.S.A sur les valeurs réciproques de leurs monnaies. Sur ce marché intérieur, rien ne change à l’annonce de la banque de France de cette parité qui peut faire durer des mois la coexistence de deux monnaies Euro et Franc. Les euros seront progressivement remplacés en quantité égale.

Il n’y a donc pas de raison qu’il y ait plus d’inflation après introduction du franc que lors de la présence unique de l’euro. Il faut savoir en effet que l’inflation des prix est souvent consécutive à l’augmentation de la masse monétaire en circulation sur ce marché intérieur. D’ailleurs l’inflation en euro existe en permanence du seul fait de cette circulation depuis sa création. L’inflation fait peur, surtout aux créanciers, à partir d’un certain niveau par la double réaction, baisse de pouvoir d’achat, donc augmentation des salaires nominaux, et rattrapage par augmentation des prix.

L’intervention des créanciers prêteurs est possible pour la contenir en augmentant les taux d’intérêt qui diminuerait alors la propension à l’augmentation de cette masse monétaire. La difficulté est de contrôler la vitesse de ce rattrapage : si elle va trop vite, le rattrapage peut arriver trop tard. Cela a été le cas en Allemagne dans les années 20 quand elle a dû rembourser des dommages de guerres énormes : les créanciers ont reçu des marks en quantité énorme, dont ils ne savaient que faire à part acheter des entreprises allemandes. Les entreprises de production ont pu également se reconstruire par l’apport des nouveaux actifs.

Il fallait donc produire à nouveau mais à bas prix ce qui a augmenté petit à petit le faible pouvoir d’achat des ouvriers, en même temps, et pour que ces ouvriers puissent acheter, augmenter leurs salaires. Une course sans fin s’est engagée du seul fait de l’importance des masses monétaires disponibles dont les créanciers ne savaient que faire d’autant plus que la valeur nominale de ;leur argent baissait. L’inflation galopait sous la masse monétaire en circulation. Ce cercle vicieux inflation et rattrapage par les prix et par les salaires a été arrêté quand les alliés ont accepté un moratoire sur la dette.

2 – L’inflation

En fait l’inflation a eu pour cause première la réintroduction des créances payées sur le marché intérieur. Il est probable que rien d’aussi pernicieux que l’inflation galopante ne serait arrivé sir les créanciers avaient gardé leur argent pour ne le dépenser que progressivement sur le long terme. Dans tous les cas, les gouvernements qui ont à leur disposition l’arme des taux d’intérêt, et une contrainte possible sur les niveaux des prix des marchés, savent comment juguler l’inflation. Cette inflation s’est d’ailleurs arrêtée après que les alliés ont accepté un moratoire, qui est devenu définitif.

Dans le cas où la France rembourserait ses dettes aux banques, dans une monnaie qui a le même cours que celui qu’elle remplace petit à petit, rien ne prouve que les banques réinjecteraient ces sommes sur le même marché. Ou alors faire ce qu’elles font c’est-à-dire prêter à nouveau à un taux supérieur pour combler son déficit public, alors que la Banque de France le ferait à taux zéro ? Ou acheter des biens matériels ? Ou enfin demander un échange avec d’autres devises ? Mais ceci n’est valable qu’à très court terme ce qui éloigne le spectre de l’inflation.

Financer le déficit actuel par de l’argent emprunté aura le même effet sur la masse monétaire en circulation que ce soit dans une monnaie interne (planche à billets) ou à l’aide de banques. En fait ce sont celles-ci qui seraient lésées si la Banque centrale les abandonnait à leur triste sort de créanciers à la recherche d’emprunteurs ! On voit, que dans l’immédiat il n’y aurait aucune raison de baisser volontairement le cours de la devise franc. Sans inflation importante, cet ajustement n’aura pas lieu d’être. Certes celle-ci peut baisser sur le marché des devises, selon l’humeur des financiers internationaux. A moins que pendant un certain temps son cours soit fixé à un niveau judicieux ?

Celui-ci dépend beaucoup de l’état de l’Économie française du moment et des taux d’intérêt probablement peu intéressants pour des prêteurs, si comme prévisible c’est la Banque de France qui les impose. Le plus bas possible pour la relance. Ce qui fait la différence avec les dévaluations que la France a connues depuis les années 50 à 70 c’est qu’elles avaient lieu sous la pression de l’intérieur. Alors qu’en cas de sortie de l’Euro cela ne pourrait venir, dans un premier temps, que de l’extérieur : en macroéconomie cyclique, on prend souvent la conséquence pour la cause.

3 - Le protectionnisme

Reste la balance des paiements. L’importation des produits énergétiques se ressentirait si le franc, comme devise a une cote faible. D’où un début d’inflation dans ce secteur. Mais la production intérieure serait en partie sauvegardée en s’opposant au dumping social de certains pays et à un cours de sa monnaie fixé anormalement bas pour qu’ils puissent mieux exporter dans les pays riches. L’avantage que l’on peut prévoir est la fin des délocalisations, et la reprise de la production interne.

Et reprise de l’export et la fameuse relocalisation progressive. Oui ! L’importation sera restreinte, mais le chômage pourra enfin baisser : moins de délocalisation, et plus d’exportation. Augmentation du prix de l’énergie importée ? La France est indépendante à 80% de ses besoins en électricité. Alors le pétrole ? Oui, le prix de l’essence augmenterait, une fois de plus, mais les écolos seront contents : le ferroutage pourrait enfin voir le jour. Et le tourisme peut y gagner.

Où est le cataclysme ?

J’ajoute que si les créanciers internationaux menacent (de quoi) ? Il sera facile de leur rire aux nez : et de leur demander combien de divisions ? On n’a plus besoin de vous, et nous pourrons commencer à vous rembourser progressivement. Ce qui leur fait peur, c’est qu’ils pensent qu’on va perdre la maîtrise du temps et des réactions brutales. Comme si ce n’était pas pire actuellement quand on glisse inexorablement vers une grande dépression en se raccrochant désespérément aux basques des banquiers.

Dans ce scénario où est la cataclysme ? Ce mot veut dire effondrement immédiat ? Sur quoi ? Sur qui ? Allons messieurs les économistes (sauf quelques-uns, qui se comptent sur les doigts de la main) pouvez-vous détailler votre scénario ? En conclusion on est loin du cataclysme annoncé : dévaluation ? Et alors ? Davantage de dettes publiques ? Pour quelles raison ? Au contraire le service de la dette diminuera, et les remboursements seront plus légers. Et enfin, si le retour à l’emploi était le seul vrai frein à la catastrophe annoncée ?



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