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Informatique quantique : l’Europe ne doit plus être la colonie du monde numérique

5 Juillet 2018
Mickaël Réault
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Depuis toujours se déroule à l’international une véritable course à l’armement en matière d’avancées technologiques. Reste que les différentes nations en lice rencontrent désormais la même limite : la puissance de calcul. Limite que l’informatique quantique promet de repousser si loin qu’elle en est devenue le nouveau graal et mobilise des investissements massifs des grandes puissances… excepté pour l’Europe en passe de manquer un des virages technologiques les plus importants.

Enjeux de souveraineté

A l’aube d’avancées technologiques majeures, causes de mutations profondes dans nos sociétés, il en est une qui va jouer un rôle d’accélérateur de particules et décupler de façon exponentielle la vitesse de progression de toutes les autres : l’informatique quantique.Désormais investie par les géants du secteur comme Google, IBM, Microsoft et Atos côté français, cette technologie est en mesure de démultiplier la puissance de calcul au point de parvenir à résoudre en quelques minutes des problèmes qui prendraient des milliards d’années aux machines actuelles. Alors, quand on sait qu’aujourd’hui biotechnologies, intelligence artificielle, réalité virtuelle et autres innovations arrivent à un point où seule la puissance de calcul les empêchera d’aller plus loin, il est facile d’imaginer comment l’informatique quantique a le potentiel de propulser, d’un coup, l’évolution de nos sociétés.

Derrière, se dessinent sans surprise des enjeux de souveraineté face auxquels l’Europe tarde à réagir, surtout à se donner les moyens. Le vieux continent a en effet manqué suffisamment de virages technologiques pour ne pas laisser passer celui-là. Comme l’a très justement dit Victor Hugo, « En temps de révolution, qui est neutre est impuissant. » En 2016, la Commission Européenne annonçait une enveloppe de 50 milliards d’euros à destination de l’industrie 4.0 dont à peine 1 milliard dédié à la recherche quantique.

Les Etats-Unis et la Chine déjà prêts

Aujourd’hui, si les enjeux de souveraineté numérique et leurs conséquences économiques sont dans toutes les bouches en Europe, les démarches associées restent malheureusement bien insuffisantes et surtout en réaction aux initiatives extérieures. L’Europe ne doit plus se contenter de suivre.Depuis des décennies les acteurs économiques européens recourent à des technologies informatiques majoritairement issues de l’industrie américaine. Qu’il s’agisse de systèmes d’exploitation (serveurs d’entreprise, smartphones, ordinateurs personnels, etc.), d’infrastructures du réseau Internet, de logiciels, de processeurs ou de moteurs de recherche. Une fois engagé, il est difficile de faire machine arrière, à la fois pour des raisons pratiques mais également d’amortissement des investissements réalisés puis d’interopérabilité.

Reste qu’in fine, l’alternative européenne n’existe pas. Actuellement, c’est ce même schéma qui se reproduit avec l’ordinateur quantique, technologie d’avenir qui risque d’occuper une place considérable. Comme l’avait notifié la sénatrice Catherine Morin-Desailly, dans un rapport délivré à la Commission Européenne, « l’Europe est en passe de devenir une colonie du monde numérique, à la fois parce qu’elle devient dépendante de puissances étrangères et parce qu’il n’est peut-être pas exagéré de dire que le sous-développement la guette. » Depuis deux ans, Microsoft se livre à une véritable course contre la montre avec IBM et Google pour être le premier à sortir son ordinateur quantique et a annoncé début mai qu’il sera prêt d’ici… 5 ans ! Il est même envisagé de mettre cette technologie à disposition du plus grand nombre dans son cloud Azur.

De son côté, la Chine n’est pas en reste sur la question puisqu’elle annonçait en 2017 la mise en service du super ordinateur Sunway TaihuLight, considéré sur le moment comme le plus rapide du marché et voué à accélérer les recherches sur le quantique. L’université de Hefei s’est vu attribuer un budget de 10 milliards pour avancer sur la technologie. Pendant ce temps, l’industrie 4.0 annoncée par la Commission Européenne devait voir ses premiers projets lancés en 2018 et à échéance 2020. A ce jour, aucune actualité n’est arrivée jusqu’à nous.

La France porte-étendard européen sur le Quantique ?

Côté français, le Commissariat à l’Energie Atomique et aux Energies Alternatives (CEA) annonçait le 3 mai dernier un projet de coopération avec la société australienne Silicon Quantum Computing (SQC) pour créer un ordinateur profitant de cette technologie. Le 22 mai, le Commissariat s’associait également à Atos pour créer une chaire industrielle dédiée à l’informatique quantique. Financée par l’Agence Nationale de la Recherche, la structure bénéficiera d’un budget de… 1,2 millions d’euros. Une initiative encourageante mais insuffisante.

Pourtant, le danger d’un décrochage, que l’on risque de payer durant des décennies en termes de souveraineté et de retombées économiques, est flagrant. Il est urgent que l’Europe investisse massivement dans l’élaboration de son propre ordinateur quantique ! La France, en retard en matière de constitution de consortiums destinés à mutualiser les forces européennes, aurait tout intérêt à s’emparer du sujet. Nous éviterions ainsi aux startups de l’Union de devoir nécessairement migrer dans le Cloud du GAFAM pour rester dans la course. Un défi technologique incontournable, relevons-le !

A propos de l'auteur : Mickaël Réault est dirigeant-fondateur de Sindup.



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