L’après-crise grecque

4 Mai 2010



Le week-end dernier, les grandes puissances européennes se mettaient d’accord sur un plan d’aide d’urgence pour la Grèce. Au total, ce sont 110 milliards d’euros sur trois ans qui ont été mis à sa disposition. Voilà qui lui permettra de faire face à ses obligations sans faire appel aux marchés financiers. Les Etats de la zone Euro contribuent à hauteur de 80 milliards d’euros tandis que le Fonds monétaire international (FMI) en versera 30 milliards.

Le tout à un taux moyen de 5 %. Une bonne opération pour les Etats, en particulier pour la France. Actuellement, elle emprunte sur les marchés au taux de 1,5 %. Une manière de financer une partie du déficit français sur le dos des contribuables grecs. Néanmoins, ce taux de 5 % fait aussi le bonheur de la Grèce puisque les marchés financiers lui proposent un taux de 9,5 %. En somme, tout le monde est gagnant.

Dégradation des déficits et spéculation

Comment un tel scénario a-t-il pu se réaliser ? Deux facteurs expliquent cette crise : l’irresponsabilité grecque face à son déficit et la spéculation des marchés. Depuis plus d’un an, la Grèce a fourni des statistiques fausses. En moins de 18 moins, son déficit public est passé de 6 % à 13,7 %. Cette année, la dette publique atteindra 133 % du Produit intérieur brut (PIB). Elle devrait continuer à progresser jusqu'à 149 % en 2013, avant de commencer à baisser en 2014, à 144 %. "C’est le problème de fond »"explique Christine Lagarde, ministre de l’Economie. Là-dessus s'est ajouté un phénomène de spéculation qui a accru la crise.

Résultat : la Grèce s’est retrouvée dans une spirale que seule une aide massive pouvait arrêter. Après l’orage, il est désormais temps de reconstruire. Cette reconstruction passe par trois axes : mise en place de mesures drastiques par le gouvernement grec afin de contrôler les déficits, une remise en cause du fonctionnement des agences des notations et une réflexion sur le pacte de stabilité.

1- Des mesures drastiques

Les économies réalisées par le gouvernement grec devront atteindre 30 milliards d’euros sur trois ans. Cet objectif permettrait de faire revenir le déficit grec sous le seuil européen autorisé de 3 % du Produit intérieur brut (PIB) d'ici 2015. La Grèce a dû prendre des mesures drastiques en ce qui concerne les salariés et les retraités du secteur public. Les 13e et 14e mois de salaire seront ainsi supprimés dans la fonction publique. Les salaires seront également revus à la baisse.

Actuellement à 21 %, la TVA sera augmentée de un à deux points d’ici la fin de l’année. Autrement dit, les Grecs auront des revenus en baisse mais des dépenses en hausse. Les années à venir s’annoncent donc compliquées. D’autant plus que le FMI vient d’annoncer ses nouvelles prévisions pour la croissance de la Grèce. Les chiffres ne sont pas rassurants. L’économie grecque devrait chuter de 4 % en 2010.

2- Agences de notation

Une réflexion doit être engagée sur les agences de notation, la régulation et le marché des CDS sur la dette souveraine. Il faut tirer les leçons des derniers mois pour éviter que cela ne se reproduise. La France et l’Allemagne se sont montrées très critiques vis-à-vis des agences de notation.

"Lorsque Standard and Poor's notifie la dégradation d'un Etat quinze minutes avant la fermeture des marchés, c'est du pousse-au-crime. C'est la garantie que tous ceux qui ont des titres vont s'en délester, sans avoir le temps de réfléchir, pour ne pas se faire rattraper par la clôture. Je vais profiter de la directive européenne sur les agences de notation qui entre en vigueur le 7 juin pour demander à l'Autorité des marchés financiers d'assurer leur surveillance, examiner les conditions dans lesquelles elles fonctionnent" explique Christine Lagarde.

3- Pacte de stabilité

Le fonctionnement du pacte de stabilité doit-il être modifié ? Depuis la crise financière, il faut qu’il prenne en compte la compétitivité et la stabilité financière des Etats. "Nous n'avons pas fait suffisamment attention aux écarts de compétitivité qui se creusaient entre l'Allemagne d'un côté, la Grèce, le Portugal et l'Irlande de l'autre" explique Christine Lagarde.

La gestion des mauvais élèves doit être également améliorée. Pour cela, les gouvernements penchent pour l’instauration de mécanismes de prévention et d'alerte qui permettent de détecter plus tôt les pays "dangereux". La manière dont l’Europe traitera les cas portugais et espagnol fera figure de test. Les marchés financiers attendent au tournant...