Bien entendu, le BTP a bénéficié des différents dispositifs publics durant la crise. A titre d’exemple, le fonds de solidarité a abondé 360.000 entreprises pour un montant de 510 millions d’euros. De plus, plus de 60.000 prêts garantis par l’Etat ont été délivrés, soit l’équivalent de 8,2 milliards d’euros, pour renforcer la trésorerie des entreprises. Enfin, l’activité partielle a touché 1,4 million de salariés mais les pouvoirs publics ont compensé cet arrêt à hauteur de 1,3 milliard d’euros au titre de mars et d’avril 2020. Cependant, depuis la mi-mai, 15% des chantiers du Bâtiment sont encore à l’arrêt. Ce qui a amené les autorités à se mobiliser, car son poids dans l’économie nationale est conséquent avec 2 millions d’emplois et dont les ressources pèsent 11% de notre Produit Intérieur Brut. Et comme la demande en projets immobiliers ou de rénovations des Français reprend, elle ne peut être déçue.
Cette question du surcoût, si elle doit trouver un débouché, n’entame pas moins en partie les capacités d’autofinancement des PME par exemple. C’est pourquoi, il est prévu pour les entreprises de moins de 50 salariés qui ont subi une perte de chiffre d’affaires important, de bénéficier de remises de charges sociales jusqu’à 50% sur leurs échéances des mois de mars à mai, sur simple demande à leur URSSAF. Par ailleurs, Toutes les entreprises pourront demander un plan d’apurement de leurs charges sociales reportées depuis mars sur une durée pouvant aller jusqu’à 36 mois.
Enfin, les maîtres d’ouvrage publics pourront augmenter les avances aux entreprises titulaires de marchés publics au-delà de 60%, sans obligation de garantie à première demande. Ceci pour tous les contrats conclus jusqu’à la fin de la période d’urgence sanitaire, augmentée de deux mois. D’autre part, pour les marchés publics, comme privés, les pénalités applicables en cas de retard sont reportées de plusieurs mois.
Dans un second temps, les pouvoirs publics visent la reprise, en mobilisant 1 milliard d’euros pour soutenir les investissements des collectivités locales qui auraient des projets dans la santé ou la transition écologique. Précisément, dans la rénovation thermique de bâtiments publics mais aussi dans la rénovation du patrimoine. La philosophie d’un tel fond est bien entendu d’apporter des commandes aux entreprises du BTP dans les prochains mois, tout particulièrement dans le contexte de la mise en place des nouvelles équipes municipales.
En plus de cette politique interventionniste, un dispositif de garantie de garantie à l’assurance-crédit est renforcé pour permettre aux acteurs du BTP de conserver leurs couvertures, car elles sont particulièrement exposées au crédit interentreprises. Un Décret est attendu en ce sens pour les PME et les ETI tout spécifiquement. Enfin, pour soutenir la trésorerie des entreprises, celles soumises à l’impôt sur les sociétés pourront demander dès 2020 le remboursement immédiat de leur stock de créances, de report en arrière de leurs déficits, ainsi que des créances qui viendraient à être constatées en 2020 du fait des pertes liées à cette crise sanitaire.
Enfin, pour assurer la demande et le renouvellement au sein des entreprises du BTP, une aide au recrutement des apprentis a été mise en place, de l’ordre de 5 000 euros à 8 000 euros par contrat pour toute personne préparant à un diplôme jusqu’à la licence professionnelle. Cette aide sera versée aux entreprises de moins de 250 salariés sans condition et aux entreprises de plus 250 salariés à la condition qu’elles s’engagent à atteindre l’objectif, déjà fixé par la loi, de 5% d’alternants en 2021. Cela devrait représenter plus de 130 millions d’euros pour le secteur.
A propos de l’auteur : Antoine Sentis, 33 ans, est directeur marketing et communication du Groupe EBP.
Le monde de la construction se porte bien. Les différentes réformes et aides de l’État ont largement porté la construction de logements neufs et les immeubles et IGH se sont multipliés dans les grandes villes. Pourtant, le BTP peine à maintenir le cap, notamment à cause du manque de travailleurs expérimentés disponibles. Malgré une croissance de 7 % en 2018, le BTP reste également un secteur risqué avec de lourdes responsabilités qu’il ne faut pas négliger.
Si le BTP peine à trouver des profils qualifiés, c’est simplement parce que les qualifications exigées sont apparues très récemment dans le monde de la construction et la plupart d’entre elles sont liées à la transition énergétique. Ainsi, toutes les connaissances liées à l’isolation et à la ventilation des logements ont été récemment chamboulées et trop peu de spécialistes de la question existent.
De plus, il faut bien prendre en compte que les qualifications demandées évoluent également très rapidement. La question de la transition énergétique a émergé il y a une dizaine d’années dans le BTP, mais elle n’est centrale que depuis moins de cinq ans. Résultat, les attentes et les exigences en la matière ont évolué, tout comme les qualifications demandées.
Si l’assurance décennale, qui couvre l’entreprise responsable du chantier pendant dix ans après sa livraison en cas de vice de fabrication, est obligatoire, ce n’est pas pour rien. Avec l’évolution des techniques, le monde du BTP est devenu de plus en plus complexe et de plus en plus exigeant. Parvenir à construire un IGH de qualité, c’est une chose, le rendre écologiquement viable en est une autre.
Voilà encore un point de détail sur lequel l’absence de travailleurs qualifiés pose problème. La transition énergétique a modifié la manière dont les immeubles sont construits et sans travailleurs qualifiés et compétents, le chantier risque de livrer un immeuble mal terminé et avec d’importants vices de fabrication. Voilà pourquoi il est souvent conseillé aux entreprises du bâtiment de souscrire à d’autres assurances que celles obligatoires, comme la RC Pro ou l’assurance dommages ouvrage.
Au problème de la pénurie de profils, s’ajoute celui de l’inégale répartition de ces profils sur le territoire. Effectivement, avec l’arrivée des JO 2024 et le projet du Grand Paris, la région parisienne concentre la majorité de l’activité du territoire, en plus de proposer les meilleurs salaires de tout le pays dans le BTP.
Résultat, même si elle manque aussi de profils qualifiés, la région parisienne est celle qui en a le plus. Les autres régions de France rencontrent alors des difficultés encore plus importantes pour embaucher des travailleurs qualifiés dans la transition énergétique et, d’après tous les experts, cette pression n’est pas près de retomber.