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Dette grecque : une solution de financement existe

9 Avril 2015
Christian Jimenez
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Un Emprunt perpétuel indexé croissance (« EPIC »), une solution inexplorée qui a du sens



La plupart des Etats des pays dits « développés » (France, Angleterre, Etats-Unis,..) ont accumulé, année après année, des déficits budgétaires qui, même s’ils sont actuellement en diminution, s’ajoutent aux déficits cumulés précédents. Ces déficits ont été financés par de la dette, si bien qu’on arrive à une situation où le stock de dettes devient gigantesque et où le simple paiement des intérêts peut devenir une charge budgétaire très lourde (charge actuellement (temporairement ?) allégée par des taux d’intérêt anormalement bas).

Des solutions qui pèsent sur la croissance

Si les déficits avaient servi à financer des investissements en infrastructures, en recherche ou en formation professionnelle, ils auraient permis d’obtenir une plus forte croissance économique qui aurait généré les recettes fiscales nécessaires au retour à l’équilibre budgétaire. Cela n’a malheureusement été que marginalement le cas.

Face à cette situation, il convient de réfléchir aux moyens d’améliorer la situation financière des Etats en général, et de la France ou de la Grèce en particulier. Plusieurs méthodes sont proposées et/ou mises en œuvre. Les principales d’entre elles tournent autour des deux principes suivants :

- alourdissement de la fiscalité,
- réduction des dépenses publiques, par exemple le nombre de fonctionnaires.

Ces méthodes agissant sur les flux de recettes et de dépenses de l’Etat ont un effet marginal sur le stock d’endettement et il faut faire attention à leurs effets récessifs. Et il peut être utile de s’attaquer non seulement à l’aspect flux ou compte d’exploitation du déficit, mais également à son aspect stock ou bilanciel dans une approche créative de gestion du passif. Pour améliorer la gestion du passif des Etats : émettre des titres perpétuels plutôt que des emprunts à échéance.

Avantages et inconvénients d’un emprunt perpétuel

Avantages pour l’Etat : le capital n’est jamais remboursé, ce qui évite d’avoir à réemprunter pour maintenir le stock de dettes au même niveau. Il y a donc allégement, toutes choses égales par ailleurs, des programmes d’emprunts ultérieurs et une moindre dépendance aux marchés financiers.
 
Inconvénients pour l’Etat : pour attirer des souscripteurs sur une durée longue, il faut payer un taux d’intérêt a priori plus élevé.
 
Avantages pour le souscripteur : bénéficier de coupons élevés, pouvoir récupérer son capital, même en l’absence de remboursement par l’Etat, dès lors que le titre est cessible et que sa liquidité sur le marché est correcte.
 
Inconvénients pour le souscripteur : risque de percevoir un coupon dont le niveau, fixé il y a de longues années, peut ne plus correspondre au rendement souhaité, notamment en cas de retour de l’inflation.
 
Pour contrecarrer cet inconvénient, il est légitime que le coupon soit indexé sur l’inflation.
L’inconvénient bascule alors vers l’émetteur qui risque de subir un coût d’emprunt trop élevé, en cas de forte remontée de l’inflation.

Croissance et non inflation

La formule proposée ici, destinée à favoriser les deux parties, consiste à indexer le coupon non pas sur l’inflation mais sur le taux de croissance économique. Soit c le taux de croissance de l’année N-1, le coupon de l’EPIC (emprunt perpétuel indexé croissance) pour l’année N s’exprimerait :
Coupon = c + spread.
 
Première question posée : faut-il considérer la croissance du PIB nominal dite ici croissance nominale ou la croissance réelle (c'est-à-dire nette d’inflation) ?
 
Il est plus favorable au porteur de prendre en compte la croissance nominale, ce qui le protège de l’inflation, mais tout dépend du spread choisi. En cas de prise en compte de la croissance réelle, le spread pourrait être majoré.
 
Il est préconisé d’opter pour la croissance nominale et d’ajouter un spread raisonnable.
 
Deuxième question : faut-il faire bénéficier au porteur de 100% de la croissance ou faut-il prévoir un taux de participation à la croissance inférieur à 100% (et si oui, à quel niveau fixer ce taux de participation ?). Là encore, la régulation peut venir du niveau du spread : avec une participation à 100%, le spread serait faible. A l’inverse, plus  le taux de participation serait faible, plus le spread serait élevé.
 
Exemples :
Coupon 1= 100% de la croissance nominale + 1%
Coupon 2= 50% de la croissance nominale + 2% 
 
Troisième question: faut-il prévoir un plancher du coupon pour les cas de récession? On peut imaginer un double mécanisme, d’une part, de plafonnement du taux de croissance négatif à hauteur du niveau du spread pour que le coupon global soit toujours positif et, d’autre part, de report de la différence entre récession effective et récession prise en compte sur les coupons ultérieurs, avec toujours le respect du principe de coupons globaux ne devant jamais être négatifs.
 
Quatrième question : faut-il payer la totalité du coupon chaque année ou ne payer que le spread et capitaliser la fraction du coupon qui correspond au taux de croissance.
Cet enjeu est majeur pour l’EPIC. Pour le porteur, c’est relativement neutre car la partie capitalisée du coupon se retrouve dans le prix de l’instrument et le porteur peut à tout moment donc externaliser 100% de la performance en revendant le titre (il est donc indispensable que ces papiers fassent l’objet de souches abondantes et liquides). Pour l’Etat émetteur, la capitalisation d’une partie du coupon d’un titre perpétuel est une forme de quadrature du cercle qui allège fortement la charge d’intérêt, au moins dans son volet trésorerie). Il faudrait toutefois sonder les réactions du public à cette formule audacieuse.

L’EPIC garant de l’équité entre l’Etat débiteur et ses crédirentiers

Le danger pour l’émetteur d’un emprunt indexé est qu’il devienne trop coûteux et qu’il soit obligé de le rembourser par anticipation. Avec l’EPIC, plus la croissance économique est forte, plus l’emprunt est coûteux mais ce coût sera plus que compensé par les recettes fiscales supplémentaires engendrées par la croissance.

Le coût pourrait néanmoins devenir trop lourd si une forte proportion des dettes publiques était émise sous forme d’EPIC, ce qui ne sera jamais le cas car l’Etat continuera à emprunter aussi à court ou moyen terme à des taux beaucoup plus bas. En conclusion, l’EPIC nous semble être un projet mobilisateur pour des économies surendettées comme celle de la Grèce …. et de la France !

A propos de l'auteur :
Christian Jimenez est président de Diamant Bleu Gestion.



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