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Alstom, STX... l'urgence d'une politique industrielle

13 Octobre 2016
Jacques Myard
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La campagne présidentielle va-t-elle permettre de faire prendre conscience aux Français de l'échec du « tout concurrence » porté par la Commission européenne ?



Au moment où les mésaventures d'Alstom défraient la chronique et où l'Assemblée nationale dénonce dans un rapport les excès de l'application extraterritoriale des lois américaines, il est urgent de poser la question de la politique industrielle de notre pays. La campagne présidentielle va-t-elle permettre de faire prendre conscience aux Français de l'échec de l'économie ultra-libérale dont le dogme du « tout concurrence » porté par la Commission européenne est la pierre angulaire ? Réhabiliter la politique industrielle, qui a été l'un des moteurs majeurs de la reconstruction de la France, n'est guère aisé. 

Le "tout concurrence"

Cela exige de briser certains dogmes, tels le « tout concurrence » dont le fameux concept du « level playing field » prôné par Bruxelles, qui aboutit à condamner toute intervention de l'Etat pour laisser une liberté totale aux forces du marché.Il est significatif que le Traité sur le fonctionnement de l'Union Européenne (TFUE) ne fasse apparaître qu'au titre XVII la mention de l'Industrie, laquelle fait l'objet d'un unique article qui rappelle, au demeurant, avec force que toute action pour l'industrie ne saurait porter atteinte à la concurrence. A contrario, les règles de concurrence font l'objet de pas moins de 9 articles de ce même traité qui ont donné lieu à de multiples décisions de la Commission et de la Cour de Justice.

La mise en oeuvre du « tout concurrence » et le règne des marchés ont des conséquences calamiteuses sur notre industrie dont la part dans le P.I.B est passée en une quinzaine d'années de 20 % à 12 %, détruisant des pans entiers de notre industrie et des centaines de milliers d'emplois. Des fleurons de notre industrie ont ainsi disparu, Péchiney, Alcatel, Alstom, sans mentionner les sous-traitants. Ce désastre industriel, dû en grande partie au dogmatisme de la politique économique de l'Union européenne et à la démission des Gouvernements, est d'autant plus inadmissible que nombre d'Etats de la planète ont des politiques industrielles protectrices de leurs marchés et de leurs entreprises, et conduisent pour certains, de surcroît, des politiques industrielles très offensives.

Pour une Agence de la prévision

Le Canada exige, par exemple, d'une entreprise étrangère soumissionnaire à un marché public, de se présenter obligatoirement avec une entreprise canadienne ce qui n'est pas le cas en Europe : où est la réciprocité ? La Chine fait de même et gère l'ensemble de son économie avec un contrôle fort de l'Etat, veillant à ce que ses entreprises ne soient pas contrôlées par des étrangers.Quant aux Etats-Unis, ils se sont dotés des mêmes règles que le Canada et la Chine mais leur politique industrielle, sous couvert de bons sentiments puritains - lutte contre la corruption - , agit de manière extraterritoriale, en violation flagrante des règles du droit international public, pour déstabiliser les entreprises étrangères ou même prendre leur contrôle. Ce sont, en une dizaine d'années, quelque 20 milliards de dollars d'amendes infligées aux entreprises françaises et européennes qui sont tombés de la sorte dans les poches du Trésor américain !

Pour affronter une concurrence mondiale exacerbée, il est temps de sortir des dogmes et d'abandonner toute naïveté. Nous devons mettre en place une politique industrielle active pour protéger nos emplois, nos entreprises dans des secteurs stratégiques, à fort potentiel, et partant notre indépendance nationale. Cette exigence impose de nommer un Ministre de l'Industrie et de la Prévision économique, de pleine compétence, indépendant du Ministre de l'Economie et des Finances, et de créer une Agence de la prévision pour arrêter les choix de nos investissements en synergie avec les industriels, les syndicats, les experts et l'Etat. Elle suppose de donner à l'Etat les moyens de s'opposer à toute prise de contrôle de nos entreprises par des entreprises étrangères même si elles apparaissent avec un faux nez européen.Il nous faut appliquer fermement la règle de la réciprocité dans le droit des entreprises. Il n'est pas admissible que nos entreprises ne puissent pas être propriétaires dans certains Etats alors que les sociétés et les nationaux de ces mêmes Etats acquièrent librement des biens immobiliers sur le territoire national ou s'y installent sans être obligés de constituer des sociétés conjointes avec des Français.

​ La question de l'euro

S'agissant de la question de l'extraterritorialité, si la loi Sapin II sur la transparence, en voie d'être adoptée, qui crée une Agence anticorruption est un élément de rééquilibrage important dans la guerre économique ouverte par les Américains, il nous faut cependant encore renforcer la loi dite de blocage de 1968 pour faire face à l'imperium juridique des Etats-Unis. La question de l'inadaptation de l'euro à notre économie et ses effets pénalisants pour notre compétitivité devra, enfin, être posée. Nous devons de toute urgence élaborer une nouvelle politique industrielle, ce qui exige une refondation de la politique économique de l'Union Européenne, en mobilisant nos partenaires européens, fût-ce au prix d'une crise ! C'est là plus qu'un défi, c'est une nécessité de survie pour la France et l'Europe.

A propos de l'auteur : Jacques Myard est député des Yvelines (LR), maire de Maisons-Laffitte et président du Cercle Nation et République



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